Une obsession, une campagne, Bottega Veneta
- emmanuellehutin
- 9 juil.
- 3 min de lecture
Pour célébrer les 50 ans de son tressage de cuir signature, l’Intrecciato, Bottega Veneta rend hommage à l’artisanat. La campagne « Craft is our language » fait dialoguer des personnalités d’horizons divers, de l’actrice Julianne Moore à l’artiste Barbara Chase-Riboud en passant par l’écrivaine Zadie Smith et le rappeur Tyler Okonma.

Pourquoi cette campagne est aussi puissante et réussie ?
Cela fait plus de vingt ans que les marques de luxe communiquent sur leur savoir-faire. Fond flouté et plan rapproché sur une main qui caresse le cuir ou des doigts qui brodent, l’artisanat est encensé et les images se ressemblent. Il n’est pas aisé de renouveler l’exercice sans répéter les mêmes figures.
La campagne de Bottega Veneta évite cet écueil et transcende le sujet en se positionnant sur un plan symbolique. Peu importe la virtuosité de ses artisans à tresser le cuir, ce qui se joue ici est plus grand : la campagne nous tresse les uns aux autres. Elle affirme que le langage des mains est universel, qu’il dépasse les disciplines, les cultures, l’identité pour être la passerelle entre soi et le monde.
Dans un contexte où tout nous divise, Bottega Veneta propose la joie simple de faire et de sentir relié.e. La main crée, rassemble, affirme, soutient, elle peut tout et se suffit souvent à elle-même. La campagne est en noir et blanc, intemporelle – on devine le prêt-à-porter de la marque sans que ce soit une mise en avant de la dernière collection – intime par les voix-off des personnalités qui se confient. « les mains de mon père, sa façon dont il jouait du piano », « Lorsque j’écoute de la musique, mes mains essaient de suivre la mélodie » « avec la main, on peut dire silence »
Ma fascination pour les mains remonte à loin, elle est derrière l’inspiration de ce film que j’ai imaginé pour CHANEL Joaillerie en 2019. Chaque association de bijoux raconte une histoire, chaque histoire est racontée par les mains, non par des mimes ou toute tentative figurative mais simplement par l’émotion provoquée par la chorégraphie des mains.
Ce film a beaucoup plu - outre le talent du réalisateur Jérémie Bouillon et de la chorégraphe Sarah Adjou - parce qu’il s’appuie sur les mêmes leviers universels que la campagne de Bottega Veneta. Dans la philosophie du yoga, la main est associée au chakra du cœur, au cœur symbolique, là où se joue la rencontre entre la matière et l’invisible, entre notre corps et notre âme. Est-ce un hasard si dans la campagne de Bottega Veneta, l’acteur Troy Kotsur, dit « l’art est le berceau de notre âme » avec la main gauche contre le cœur ? Je ne crois pas…
Je traque les mains partout, dans les magazines, dans les expositions, chez le primeur. Mon Instagram est rempli de mains artistiques, on m’a d’ailleurs conseillé un petit livre que j’adore : Jeux de Mains (Stephen Ellock et Cécile Poimboeuf-Koizumi) qui rassemble des représentations de mains de toutes époques et tout horizon artistique.

Dans ce livre, il y a aussi les mains de Georgia O’Keeffe par Alfred Stieglitz, les mains rouges de Louise Bourgeois, la marqueterie d’ Alice Guittard, les photos de Ishiuchi Miyako, les peintures de Françoise Pétrovitch, les gravures de Lesley Dill.
Dans une interview de la French Touch – BPI pour laquelle on m’a demandé mes coups de cœur, j’avais déjà parlé de mon obsession pour les mains. Vous pouvez la lire ici.
C’est un sujet d’inspiration infinie, motif récurrent de l’histoire de l’art, il y a encore beaucoup de choses à imaginer pour faire parler les mains dans les communications des marques.
Je vous prends en main pour qu’on l’imagine ensemble ?













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